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Maître de Sagesse : Jiddu Krisnamurti


Jiddu Krishnamurti, le ténor du silence. Issu d’une lignée de lettrés brahmanes, Jiddu Krisnamurti fut très jeune associé à la Société théosophique avant de s’en séparer pour promouvoir une spiritualité sans gourou ni conditionnement, libre, dans la méditation.

Dès sa naissance, le 11 mai 1895 dans une petite ville du Tamil Nadu au nord de Madras (Inde), les astrologues lui prédisent une destinée exceptionnelle. Enfant, il apparaît à première vue comme un être mentalement retardé. C’est qu’il est profondément marqué par le chagrin, sa mère meurt alors qu’il est à peine âgé de 10 ans. Son père est membre de la société théosophique, qui se dit œcuménique, créée à New York à la fin du XIX° siècle dont le siège est dans une magnifique propriété d’un faubourg de Madras. En échange de service, Narianah, son père, y obtient un logement gratuit pour son fils dès 1909. Depuis sa fondation, le but recherché par la Société est de préparer l’humanité à recevoir « l’instructeur du monde ». Jiddu Krishnamurti fut remarqué par Charles Webster Leadbeater, l’un des membres les plus actifs dont il dira qu’il a une aura merveilleuse dépourvue de toute trace d’égoïsme et lui prédit une vie de grand orateur et d’instructeur spirituel. L’homme s’attache alors particulièrement à son éducation, ainsi qu’à celle de son frère, Nitya, tant sur les plans physique, intellectuel et spirituel. Krishnamurti apprend à s’exprimer en public avec aisance et écrit un premier livre, « Aux pieds du maître » (1909) dans lequel il résume son expérience spirituelle et sa conception de l’état de disciple, en prônant quatre conditions : « Etre sans désir, bien se conduire, avoir acquis le discernement et aimer. » En février 1911, Krishna et son frère partent pour l’Angleterre et la France pour parfaire leur instruction. Ils fréquentent l’université d’Oxford. Nitya entreprend avec succès des études de droit alors que son frère échoue. Mais lors de ses interventions publiques, tous s’émerveillent de sa présence et de son autorité, de son épanouissement et de la pertinence de ses arguments qui mettent l’accent sur un thème qu’il ne cessera de développer : la nécessité de se détacher intellectuellement de toutes les traditions, les idées reçues et les coutumes. Il faut, dit-il, « se libérer du connu » pour avoir un esprit toujours neuf. C’est aux Etats-Unis, le 20 août 1922, que Krishna fait une expérience qui change sa vie. Ce phénomène, qu’il appelle « le processus », est décrit ainsi par Nitya qui en est témoin : « Pendant trois jours, Krishnamurti ressentit des phénomènes pénibles de chaleur intense, des douleurs au niveau de la tête et de la nuque, des épisodes pendant lesquels il semblait inconscient, sans contrôle apparent du corps. » L’intéressé lui-même raconte, dans les jours suivants, ce qu’il a vécu dans une longue lettre qui se termine en ces termes : « Je me sentais suprêmement heureux, car j’avais vu. Rien ne serait plus comme avant. J’ai bu l’eau claire et pure de la source de la fontaine de ma vie et ma soif est apaisée. Je ne serai jamais plus dans l’obscurité complète. J’ai vu la lumière. J’ai atteint la compassion qui guérit toute tristesse et toute souffrance. Ce n’est pas pour moi, mais pour le monde… » Cette citation explique ce que sera l’orientation future de Krishnamurti qui, toute sa vie, ira par le monde transmettre ce qu’il a vécu et compris lors de ces visions. Le « processus » se manifeste désormais à chaque fin de journée pendant une à deux heures, avec de fréquents évanouissements qui le laissent épuisé, exsangue. Les hypothèses émises par les témoins sont celles de l’éveil de la Kundalini ou l’ouverture du 3ème œil. Krishnamurti ne doute pas de la nécessité de cette souffrance pour préparer son corps, il ne cherche pas à en atténuer les symptômes par une quelconque médication. Petit à petit, ses relations avec la Société théosophique se dégradent. Dans ses discours, il nie la nécessité de suivre un maître, prône la réalité d’une voie directe vers la vérité, que chacun devrait découvrir par soi-même. Le 3 août 1929, devant plus de 3000 membres, il prononce la dissolution de l’ordre qu’il présidait depuis des années, faisant un discours mémorable qui pourrait s’intituler « la vérité n’a pas de chemin ». Il affirme qu’aucune religion, aucune secte, aucun « isme » ne peuvent révéler la vérité, que celle-ci ne peut pas être organisée, car, à ses yeux, toute organisation est une faiblesse, un esclavage qui empêche l’individu de se développer. Dès lors, en accord avec ses convictions, il dit vivre dans une « extase » qui ne le quittera plus. Il continue à voyager une Europe, en Inde et aux Etats-Unis pour donner des conférences suivies par plusieurs centaines d’auditeurs fidèles. Il crée des écoles, en Inde et en Angleterre où il y est préconisé d’adapter l’enseignement à l’élève plutôt que de le contraindre à un rythme qui ne lui convient pas. Le programme scolaire normal est respecté mais avec le souci de donner aux enfants une éducation dénuée de préjugés nationaux, raciaux, religieux, de classe et de culture. Il meurt le 1er février 1986, après avoir beaucoup souffert, d’un cancer du pancréas. Il est réduit en cendre sans rituel, sans prière ou cérémonie d’aucune sorte. Car, selon lui, l’enseignant n’est pas important : seul l’enseignement à de la valeur et doit être compris et suivi. *** « La pensée, même juste, est toujours conditionnée : elle est un résultat, un produit fabriqué, une coordination d’éléments, le résultat de la mémoire, d’un modèle, de l’habitude, de l’exercice. Elle se façonne d’après la peur et l’espoir, l’envie et le devenir, l’autorité et l’imitation » dit-il dans une de ses conférences. Krishnamurti oppose à cette définition celle du « penser » : « Un processus continu né de la découverte de soi, de l’auto-lucidité. Il n’y a ni commencement ni fin à ce processus, de sorte que le « penser » est éternel. (…) Il est né avec la délivrance de toute peur et de tout espoir ; (…) L’action du « penser » va au-delà et au-dessus des opposés, tandis que la pensée, même juste, est conditionnée et opprimés par ceux-ci. » » Pour lui, l’une des définitions de la méditation serait le moment où l’objet observé et l’image que l’on en a coïncident exactement. Pour bien comprendre ce qu’il entend par méditation, il convient de lire « La révolution du silence » dont il existe de nombreuses éditions et dont voici un extrait : « La pensée est structurale, raisonnable ou déraisonnable, objective ou malsaine, et lorsqu’elle essaie de méditer par raison, elle projette inévitablement ce qu’elle est et prend sa structure pour la réalité. C’est comme le croyant qui médite sur sa propre croyance : il renforce et sanctifie ce qu’il a créé lui-même, poussé par la peur. Le mot est l’image ou le tableau, objet d’une idolâtrie qui devient la pensée essentielle… Le mot n’est pas seulement un élément du langage, il n’est pas simple son, c’est aussi un symbole, le rappel de tout souvenir susceptible de déclencher le mouvement de la mémoire, de la pensée. La méditation est l’absence totale de ce mot. La racine de la peur est le mécanisme du mot. » « La méditation en réalité est le déni de toute structure de la pensée. » *** A lire : De Krishnamurti : « La révolution du silence », « L’Eveil de l’intelligence », « Journal », « De la liberté », « Le temps aboli », « A propos de Dieu », « Le vol de l’aigle ». Il existe sur Youtube de nombreuses vidéos d’enregistrements des conférences données par Jiddu Krishnamurti.

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Extrait : "Le monde des religions" - hors série de décembre 2017

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